Dr Sayyada Mawji :
Vous êtes-vous déjà demandé comment votre alimentation pouvait impacter votre cycle menstruel ? Modifier la composition de vos assiettes peut-il aider à réduire les symptômes du syndrome prémenstruel (SPM) ? Et dans ce cas, quels changements faut-il opérer ? Dans cet article, je vais vous donner des conseils nutritionnels pour lutter contre le SPM et vous en expliquer les rouages scientifiques.
Pour commencer, voici un petit aperçu du cycle menstruel et des hormones impliquées dans ce processus.
Le cycle menstruel est composé de trois étapes : la première est la phase folliculaire, la deuxième l’ovulation et la troisième la phase lutéale.
Durant la phase folliculaire, les taux d’œstrogènes et de progestérone sont au plus bas, c’est ce qui provoque l’élimination de la muqueuse utérine, c’est-à-dire les règles. C’est alors le début du cycle. Environ 5 à 8 jours après le début des règles, le taux d’œstrogènes commence à augmenter pour atteindre un pic en milieu de cycle, ce qui entraîne l’ovulation (libération de l’ovule).
Lors de la phase lutéale, le niveau d’œstrogènes reste élevé et le taux de progestérone commence lui aussi à augmenter, préparant ainsi le corps et l’utérus à une éventuelle grossesse. Si l’ovule n’est pas fécondé, les taux de ces deux hormones diminuent, la muqueuse utérine se désagrège et vos règles sont de retour. Le cycle recommence alors.
Le cycle menstruel est principalement régulé par quatre hormones que sont les œstrogènes, la progestérone, l’hormone folliculo-stimulante (FSH) et l’hormone lutéinisante (LH), même si d’autres hormones du corps sont également impliquées. Les taux de ces hormones fluctuent selon les différentes phases du cycle.
Il est important de noter que non seulement ces hormones sont impliquées dans la reproduction, mais qu’elles jouent également un rôle dans la régulation d’autres systèmes du corps. Elles peuvent influer sur notre appétit ou notre métabolisme et agir sur nos organes, tels que le cerveau et le cœur, ainsi que sur les muscles et les os.
Qu’est-ce que le syndrome prémenstruel (SPM) ?
Le syndrome prémenstruel (SPM) est une combinaison de manifestations physiques et émotionnelles qui apparaissent une ou deux semaines avant le début des règles (au cours de la phase lutéale). Il comprend différents symptômes d’intensité variable, tels que : fatigue, sautes d’humeur, troubles du sommeil, ballonnements, sensibilité de la poitrine, troubles de la libido ou modification de l’appétit[1].
Les causes précises du SPM ne sont pas encore totalement comprises. Les scientifiques pensent que ce syndrome est lié aux fluctuations des taux d’hormones et de substances chimiques du cerveau pendant le cycle menstruel.
L’alimentation peut-elle aider à atténuer les symptômes du SPM ?
Des choix de vie plus sains tels qu’une activité physique régulière, une alimentation équilibrée et saine, un sommeil de meilleur qualité et de bonnes habitudes peuvent contribuer à atténuer les symptômes du SPM. Que recommandent les études en matière d’alimentation ? Quels aliments devriez-vous consommer ou éviter pour réduire les symptômes du SPM ?
Augmentez vos apports en glucides complexes
Les aliments composés de glucides complexes, tels que les produits céréaliers complets, les légumes et les légumineuses, libèrent leur énergie progressivement dans l’organisme, ce qui aide à stabiliser la glycémie, à garder une humeur constante et à éviter les fringales en vous faisant vous sentir rassasiée plus longtemps.
Les glucides complexes sont également source de vitamines, minéraux et fibres, qui sont essentiels dans une alimentation saine[2]. Une étude a révélé que le fait de remplacer les céréales raffinées (glucides simples) par des céréales complètes (glucides complexes) contribuait à nettement atténuer les symptômes du SPM sur les plans physique et émotionnel[3].
Augmentez vos apports en fibres
Les aliments riches en fibres, tels que les fruits et les légumes, peuvent avoir une action protectrice contre les symptômes psychologiques, physiques et plus généraux du SPM[4]. Une étude menée sur les liens entre SPM, comportements alimentaires et mode de vie a révélé que cela était probablement dû aux propriétés antioxydantes et anti-inflammatoires des aliments d’origine végétale[4]. Essayez de consommer une grande variété de fruits et de légumes, notamment des légumes à feuilles vertes qui sont riches en fibres et en nutriments.
Augmentez vos apports en oméga-3
Les acides gras oméga-3 sont considérés comme des acides gras essentiels. On les retrouve dans les poissons gras, tels que le saumon, la sardine ou encore le maquereau, mais aussi dans les noix, les graines de chia et les graines de lin. Des études suggèrent que les acides gras oméga-3 pourraient réduire l'intensité du SPM en raison de leurs propriétés anti-inflammatoires qui peuvent par exemple atténuer les crampes et les symptômes liés à l’humeur[5].
Hydratez-vous suffisamment
Boire une grande quantité d’eau est essentiel pour être en bonne santé. Cela peut également réduire certains symptômes du SPM, tels que les ballonnements, la constipation et la fatigue en général. Lors de la phase lutéale, lorsque les taux d’œstrogènes et de progestérone sont bas, le corps est plus sujet à la rétention d’eau, ce qui entraîne des ballonnements et des crampes. De ce fait, une bonne hydratation peut diminuer ces symptômes. Essayez de boire 8 verres d’eau par jour.
Augmentez vos apports en vitamines et minéraux
En ce qui concerne les vitamines et les minéraux, le calcium, le magnésium et la vitamine D pourraient jouer un rôle dans la diminution des symptômes du SPM. Ces vitamines et minéraux sont essentiels à de nombreuses fonctions corporelles, dont les fonctions musculaires et nerveuses, la stabilité de l’humeur et la bonne santé osseuse[6]. Ainsi, le fait d’augmenter vos apports en ces micronutriments pourrait contribuer à atténuer vos symptômes.
Parmi les aliments riches en magnésium, on retrouve les épinards, l’avocat, le chocolat noir et les amandes [7]. De plus, une étude a révélé que de faibles taux de calcium et de vitamine D durant la phase lutéale du cycle menstruel pouvaient être à l’origine de symptômes du SPM ou les aggraver[8]. Améliorer votre alimentation pourrait donc jouer en votre faveur. Essayez d’ajouter quelques-uns des aliments suivants dans vos menus afin d’augmenter vos apports en micronutriments : produits laitiers, légumes à feuilles vertes, tofu, sardines ou saumon.
Réduisez vos apports en sucre et en sel
La modification des taux hormonaux avant le début de vos règles (phase lutéale) entraîne également une chute du taux de sucre dans l’organisme et une chute du taux de sérotonine dans le cerveau (appelée hormone du « bonheur »). C’est pourquoi tant de femmes sont sujettes aux fringales. Ne culpabilisez pas d’y céder occasionnellement, mais faites attention, car une consommation de sucre trop élevée peut aggraver les symptômes du SPM. Préférez plutôt des aliments riches en protéines, tels que le poisson, les œufs, les légumineuses, les noix, les graines et les glucides complexes. Ils vous aideront à stabiliser votre glycémie.
Une trop grande consommation de sel peut également intensifier les ballonnements et la sensibilité de la poitrine à cause de la rétention d’eau. Alors, essayez de limiter votre apport en sel[4].
Réduisez l’alcool et la caféine
Des études ont montré que les symptômes du SPM étaient plus intenses chez les femmes consommant de l’alcool [10]. Limiter la consommation d’alcool peut aider à diminuer les sautes d’humeur, l’irritabilité et les crampes.
En ce qui concerne la caféine, les données relatives aux quantités exactes que nous pouvons absorber varient, mais dans l’ensemble, les experts préconisent de limiter la consommation de café[11]. Il ne faut pas non plus oublier que l’alcool et la caféine ont un impact sur le sommeil, ce qui peut aggraver les symptômes du SPM.
Ce qu’il faut retenir
Les conseils nutritionnels ci-dessus constituent une excellente base, cependant, plus d’études sont nécessaires dans ce domaine pour tirer des conclusions définitives sur l’impact de l’alimentation sur le SPM et le cycle menstruel. Le plus important, c’est d’essayer d’adopter une alimentation saine et équilibrée, d’écouter son corps et de chercher à améliorer les autres facteurs de vie pouvant jouer un rôle en la matière.
N’oubliez pas, le syndrome prémenstruel touche les femmes de diverses manières et à des degrés d'intensité variable. Si ces symptômes vous affectent, il est important que vous en parliez à votre médecin car plusieurs approches sont possibles.
Biographie de l’auteur
Installée à Londres, Sayyada Mawji est médecin généraliste et spécialiste en santé et en bien-être. Elle s’efforce avec passion de sensibiliser la population aux questions de santé, avec un intérêt tout particulier pour la santé des femmes. Elle lutte également sous le nom @doctorsayyada contre la désinformation en ligne sur tout ce qui a trait à la santé. Dr Sayyada collabore régulièrement avec des médias nationaux et internationaux, anime des conférences TEDx et fait partie du panel de spécialistes en santé du magazine Women’s Health. Elle figure sur la « New Year Honours List » pour 2023 et a reçu la « British Empire Medal » pour son engagement dans le domaine de la santé.
Sources
[1] https://www.nhs.uk/conditions/pre-menstrual-syndrome/
[2] Complex carbohydrates - medlineplus.gov National library of medicine
[3] Diets enriched with whole grains reduce premenstrual syndrome scores in nurses: an open-label parallel randomised controlled trial Mozhgan Esmaeilpour et al
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30761961/
[4] Premenstrual Syndrome Is Associated with Dietary and Lifestyle Behaviours among University Students: A Cross-Sectional Study from Sharjah, UAE
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6723319/#B69-nutrients-11-01939
[5] Effect of omega-3 fatty acids on premenstrual syndrome: A systematic review and meta-analysis https://obgyn.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/jog.15217?af=R
[6] Effects of Magnesium and Vitamin B6 on the Severity of Premenstrual Syndrome Symptoms https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4161081/
[7] Effect of magnesium supplementation on women's health and well-being https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2352364621000079#bb0010
[8] A systematic review of the role of vitamin D and calcium in premenstrual syndrome https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6422848/
[10] Premenstrual syndrome and alcohol consumption: a systematic review and meta-analysis
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29661913/
[11] https://flo.health/menstrual-cycle/health/period/coffee-on-period-and-during-pms